L' Arbre aux papillons d'or France, Singapour, Espagne, Vietnam 2023 – 178min.

Critique du film

Lent chemin de foi

Critique du film: Colin Schwab

Lauréat de la Caméra d’Or du dernier Festival de Cannes, «L’arbre aux papillons d’or» est le premier long-métrage de Thien An Pham . Agencé autour du lien à la spiritualité, il nous immerge, trois heures durant, dans les paysages urbains et ruraux du Vietnam.

Thien (Le Phong Vu), un trentenaire habitant à Saïgon, apprend la mort de sa belle-sœur, décédée des suites d’un accident de moto. Son jeune fils Dao (Nguyen Thinh) est désormais presque orphelin, son père l’ayant abandonné quelques années auparavant. C’est alors à Thien que revient la charge de l’enfant : il retournera avec lui dans son village d’origine pour s’occuper de l’enterrement de la défunte. Dans ce lieu, son passé, ses questions existentielles et le mystérieux départ de son frère occuperont son espace mental.

«Ça veut dire quoi, plus exister ?». Suite à l’enterrement de sa mère, Dao questionne son oncle. L’insolvabilité de cette naïve question enfantine, posée dans l’obscurité la plus totale – nous n’entendons que les voix des personnages – résonne fort, trop fort, en Thien. Bientôt, elle le poussera – lui qui nous est présenté dès la première scène comme étant en proie à une forme de spiritualité – à concrétiser sa recherche de foi. S’il la trouve, c’est aussi une réponse aux questions trop grandes, comme celle de la mort, qu’il trouvera.

Motif récurrent et passionnant du long-métrage, bon nombre de ses personnages sont incapables de faire face au trop-plein d’incertitude d’une vie sans lois. Certain·e·s choisiront alors de rejoindre des institutions aux règles strictes, structurant la vie dans ses moindres détails, agissant comme un remède face à ce mal : vivre dans un couvent, rejoindre l’armée, etc. Mais la stabilité que ces organisations confèrent ne rime pas, pour Thien, avec spiritualité. S’il veut trouver la foi, il doit chercher ailleurs.

Caractérisée par ses plans très longs aux mouvements inventifs, la première partie du long-métrage se déploie de manière linéaire, simple et efficace. Mais, progressivement, les objectifs du personnage et l’ordre dans lequel les événements nous sont racontés deviennent de plus en plus flou. Alors, tout devient plus lent, atmosphérique, silencieux, dicté par un rapport sensoriel et méditatif à l’univers. Ce que ce second temps semble incarner, c’est une réponse esthétique aux questions posées sur la foi : il matérialise, par sa forme, un rapport spirituel au monde, caractérisé par le lâcher-prise, la focalisation sur l’instant. Dans le présent, l’éternité, un bonheur qui absorbe toute forme d’angoisse.

Bien que sa place au sein du long-métrage se justifie très bien en tant que concept, ce dernier mouvement ne convainc pas toujours dans son exécution : certaines de ses séquences peinent à constituer une proposition esthétique assez forte, unique, magnétique, pour que notre attention ne finisse par se déporter ailleurs. Le message transmis avant cette partie est presque trop explicite, ne nous laissant que trop peu de zones d’ombres à investir, d’informations à reconsidérer, de chemins à parcourir mentalement pendant ces instants de flottements esthétiques. Une petite carence qui ne saurait nuire à la qualité de l’œuvre dans son ensemble.

15.02.2024

4

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Commentaires

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Eric2017

il y a 10 mois

J'aime beaucoup le cinéma asiatique et ce film vietnamien n'y échappe pas. Tout est dans le subtile, la délicatesse de l'image, le cadrage et pas de dialogues superflus. Petit bémol quand même, parfois les scènes sont vraiment beaucoup trop longues. Exemple ce plan filmé de loin où Thien tombe en panne de scooter. La scène dure près de 5 minutes, pas de zoom rien, le tout dans un silence total. Dans tous les cas un très beau film. (G14.01.24)Voir plus


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