La plus précieuse des marchandises Belgique, France 2024 – 81min.

Critique du film

La plus précieuse des marchandises

Critique du film: Laurine Chiarini

Conte animé relatant l’adoption extraordinaire d’une petite fille par un pauvre couple de bûcherons sur fond de Shoah, «La Plus Précieuse des Marchandises» est un récit lumineux d’espoir, de solidarité et d’amour.

Dans les bois, vivaient une fois un pauvre bûcheron et une pauvre bûcheronne. À côté des wagons qui, chaque jour, traversent la forêt, la bûcheronne prie les dieux du train de lui offrir une marchandise, même une toute petite. Un bébé est jeté d’un wagon: son vœu est exaucé. Dans le froid et la misère de la guerre, la «petite marchandise» et sa nouvelle famille affrontent le pire de la noirceur humaine. Aux tournants de l’histoire, là où esprits et destins se croisent, au gré des rencontres humaines, ce conte brille dans la nuit, petite lueur d’espoir à la flamme vacillante qu’aucun souffle ne peut éteindre.

Reparti les mains vides de Cannes, où il était projeté en compétition officielle, «La Plus Précieuse des Marchandises», qui a eu droit à une longue ovation debout et a ému des salles archicombles à Annecy, repartira-t-il avec une récompense? Sous des coups de crayons au minimalisme amplifié, la force du film réside dans son côté intemporel et brillamment universel. S’éloignant des classiques, libéré aux entournures, ce conte est celui d’une histoire de beauté qui, au milieu de l’horreur, peut encore exister. Alors que s’éteignent petit à petit les derniers survivants de l’holocauste et leurs témoignages, comment continuer à raconter ? Le choix des images animées, contrairement à des prises de vue réelles, trouve la juste voie entre sujet et audience, faisant du spectateur et de son imagination un rouage actif de la narration.

Dernier film auquel le grand Jean-Louis Trintignant a prêté sa voix de narrateur avant la fin de sa vie, l’univers visuel du film, qui se déroule en Pologne, jamais nommément citée, mais rapidement devinée, rappelle celui de la nature et des bois de bouleaux qui peuplent les campagnes de l’est. Le directeur artistique s’est inspiré des dessins d’Ivan Bilibine, artiste russe connu pour ses illustrations de contes folkloriques. Élément central dans la déportation des Juifs et personnage à part entière, le train est aussi celui par qui arrive l’inespérée «petite marchandise». Des années plus tard, c’est en train que celui qui, dans un acte de foi, avait désespérément tenté le tout pour le tout en jetant sa petite fille par la fenêtre d’un convoi pour la sauver des camps de la mort, revient en Pologne.

Porté par une voix profonde et humaniste, le film n’élude pas les horreurs, mais choisit de mettre en lumière le bien, ce que l’homme, respectivement ici la femme, ont de meilleur. Choisir le dessin, c’est aussi jouer avec la fluidité des lignes, tour à tour fixes ou animées. Les scènes les plus dures, celles où sont brûlés les corps décharnés, où les visages, figés dans une horreur béante, fixent le néant – et nous, spectateurs, en même temps – dépeintes sous des traits immobiles en noir et blanc, étendent plus loin encore le registre émotionnel, dans un silence fracassant.

«Les sans-cœurs ont un cœur», dit la bûcheronne, puis le bûcheron, dénominateur commun qui relie chaque être humain. S’il ne fallait voir qu’un film sur l’holocauste et que les presque 10 heures du documentaire «Shoah» de Claude Lanzmann vous rebutent, courez voir «La Plus Précieuse des Marchandises».

(Festival international du film d'animation d'Annecy 2024)

22.07.2024

4.5

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vincenzobino

il y a 3 jours

Le cœur des hommes
Il était une fois en pleine seconde guerre mondiale quelque part en Europe de l’Est: un bûcheron vivant avec son épouse proche d’une voie ferrée où les trains se suivent. Un jour cette femme entend un cri de bébé et trouve un nourrisson jeté d’un de ces trains. Elle compte profiter de ce cadeau divin offert, n’étant pas en mesure d’enfanter et convainc son époux tout d’abord réticent à garder cette petite fille à la cacher et mentir à ses collègues antisémites.
Le voici ce retour de Hazanavicius et un apparent témoignage sur les conséquences de la Shoah. Il est assisté de Jean-Claude Grumberg, l’auteur du livre éponyme. Une forte expérience.
Un train sifflant plusieurs fois, une femme désespérant de trouver du lait et voyant en cette marchandise humaine miniature une sorte de monnaie d’échange : les vingt premières minutes ont de quoi choquer si l’on a pas vécu cette période, mais elles illustrent la culpabilité humaine générale avec des Sans-cœur en possédant un et des humains en étant dépourvu.
Ce mâle semble appartenir à la seconde catégorie mais finalement un animal va involontairement forger les destins, cruels ou salvateurs. Et l’analyse alors proposée nous fait froid dans le dos et finalement le retour en arrière sur le pourquoi de cette arrivée enfantine et le témoignage « invisible » du statut de déporté va redonner foi en l’humanité.
Hazanavicius en Artist pur va nous proposer sur son ultime demi-heure une véritable leçon de survie où l’on espère une retrouvaille. Et si cette dernière est incertaine, la qualité musicale et le doublage particulièrement Gadebois et Trintignant vont nous redonner foi au final. Oui certains humains ont un coeur.
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Dernière modification il y a 2 jours


Eric2017

il y a 5 jours

Re...bof ! Si les dessins et la réalisation y sont excellents, le sujet de ce conte adapté au cinéma n'apporte rien en se temps de guerres. Je dirai même qu'il rabâche une fois de plus les horreurs de la dernière guerre mondiale. Mais force est de constater que l'humain ne tire aucune leçon du passé puisque même le peuple victime se transforme en bourreau. Bref, je n'ai pas aimé ce film d'animation. Le positif, on y retrouve la voix chaleureuse de Trintignant (décédé en 2022) et celle de Grégory Gadebois. (G-22.11.24)Voir plus


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