No Other Land Norvège, Palestine 2024 – 96min.

Critique du film

Journal de l’occupation israélienne

Critique du film: Kilian Junker

Brûlant d’actualité, «No Other Land» documente de l’intérieur la violence de l’occupation israélienne en Cisjordanie.

Centré sur les alentours du village qu’habite Basel Adra – un des réalisateurs palestiniens – et épaulé dans un esprit de franche camaraderie par Yuval Abraham, un israélien, ils s’en vont ensemble sillonner la région de Masafer Yatta pour filmer les raids organisés par l’État d’Israël dans le but de déloger les palestiniens. Chaque message sur leur téléphone leur indique le site d’un nouveau carnage, où des militaires armés jusqu’aux dents défendent des bulldozers dévastant des villages entiers avant de disparaitre aussi vite qu’ils sont apparus.

Basel et Yuval devraient être des ennemis que tout oppose. L’un est palestinien, directement impacté par les destructions de village et traqué par les policiers qui tentent vainement de l’intimider. L’autre est israélien et pourrait profiter de son confort sans se préoccuper des atrocités commises par son propre gouvernement. Accompagnés de deux autres co-réalisateurs, ils sont pourtant animés par la même envie compulsive de documenter, de tendre une caméra à chaque nouvelle exaction, de décrire de l’intérieur la vie insoutenable dans une Cisjordanie déchirée entre deux pôles apparemment irréconciliables. Mais si le documentaire s’inscrit dans la catégorie d’un «journalisme incarné», ils en évitent tous les écueils pour livrer un récit autant intime que profondément universel.

Impassibilité face à la détresse, inhumanité en treillis, délogement forcés, coercition physique et psychique, «No Other Land» s’enfonce dans un crescendo de violence, convoquant par son imagerie des heures sombres de l’histoire qui font décidément froid dans le dos. Si le film questionne sur la puissance des images et sur le désir entretenu par ces jeunes hommes d’alerter avec elles la communauté internationale, il parvient par son dispositif imparable à laisser entrevoir une pointe d’espoir dans cette masse noirâtre d’horreur. Après la Berlinale où il est reparti avec le prix du meilleur documentaire, «No Other Land» récolte le prix du public à Visions du réel sous les applaudissements d’une salle comble. Gageons que cette moisson de récompenses attire une audience large vers ce film, porte-voix d’une population qui peine décidément à se faire entendre.

(Visions du Réel 2024)

12.09.2024

5

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Commentaires

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Kino

il y a 1 jour

Un film documentaire poignant et d'actualité. Travail de pro à petit budget: Yuval, Israélien qui rêve de paix et son ami Basel, Palestinien qui rêve de liberté, documentent ensemble la destruction du village de ce dernier. Ce sont en fait une 15aine de hameaux en Cisjordanie qui, du jour au lendemain, se retrouvent dans une zone déclarée militaire par la haute cour. Des ordres de démolition sont émis en application de la loi votée démocratiquement. s'ensuivent des cortèges de bulldozers, de SUV blindés, de soldats armés jusqu'aux dents, de colons enhardis par le sentiment d'impunité qui font face à une population indigente, sans défense, occupée à sauver un matelas par ci, un frigo ou une chèvre par là et qui assiste impuissante et résignée au nivellement de leurs maisons, à la destruction de leur unique école, au ciment qu'on fait couler dans leur puits d'eau... ils doivent choisir entre "vivre" sous les décombres et dans la peur ou quitter leur terre sans retour. Yuval et Basel, les 2 amis à la fois courageux et démunis font de leur mieux pour alerter sur le sort de ces villages. Des chaînes de télévision finissent par en parler, même Anthony Blair s'y rend en personne. Cela ralentit ponctuellent la spoliation qui reprend ensuite de plus belle. A part quelques vieilles séquences de Basel tout jeune et de sa famille, le film est tourné de 2020 à 2023, juste avant l'impitoyable guerre en cours qui fait suite à l'abominable attaque terroriste du 7 octobre. Quelle spirale infernale ! Et dire que ça dure depuis la 2e guerre mondiale. 
4/5Voir plus


tennisfan

il y a 3 jours

Ce film est vraiment une claque.


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